BLACKBERRY SMOKE With Bob Weir: An Evening at TRI (2016)

Ce DVD, irréprochable au niveau du son comme de l’image, démontre trois choses. Premièrement, l’idée d’associer Bob Weir (un des membres fondateurs du Grateful Dead) à Blackberry Smoke se révèle excellente. L’intimité des Studios TRI contribue à cette collaboration fertile et réussie. Personne ne tire la couverture à lui et la musique s’en retrouve largement gagnante. Le père Bob a gardé la forme, et sa voix ainsi que son jeu de guitare restent d’un haut niveau. Par sa présence, il apporte une décontraction évidente et les morceaux auxquels il participe se revêtent d’une ambiance intemporelle. Il reste en retrait sur le traditionnel « Colombus Stockade Blues » mais se rattrape largement sur « Deep Elem Blues » avec un solo de slide acoustique qui colle à merveille avec le « Southern groove » distillé par Blackberry Smoke. « Big Boss Man » revient aux racines avec une rythmique ralentie (genre « Redneck » d’Atlanta Rhythm Section) et un solo « laid-back » de Charlie Starr. On apprécie la longue et délicieuse reprise de « Big River » (du grand Johnny Cash) en version country-rock avec un superbe solo country de Charlie. Ensuite, clin d’œil aux origines du rock avec le « Promised Land » du regretté Chuck Berry. Pour l’occasion, Charlie Starr se fend d’un bon solo. Enfin, « Up On Cripple Creek » bénéficie d’un solo de guitare wah wah de la part de Charlie et d’un final de six-cordes à l’unisson. Dans les bonus, on peut également profiter d’un splendide « The Weight » du Band. Il n’y a pas à dire, on passe un excellent moment !

Deuxièmement, Blackberry Smoke n’est pas un groupe de rock sudiste à proprement parler (il ne l’a d’ailleurs sans doute jamais été) et semble plus proche de la West Coast que du Sud profond. Les musiciens excellent dans un registre plus soft comme en témoignent « The Whippoorwill » (une lente ballade planante très seventies, dans l’esprit du « Stranger » de Johnny Winter) ou la reprise du superbe « Willin’ » de Lowell George. « Ain’t Got The Blues » tape du côté de la country mid tempo et la ballade mélodique « One horse town » marie habilement Bruce Springsteen et la country music. Il n’y a que sur « Mississippi Half-step Uptown Toodeloo » que la bande à Charlie laisse parler l’esprit sudiste avec des phrases de guitare à la Dickey Betts et un final de six-cordes à la tierce. Évidemment, le choix de ces titres est orienté et Charlie et ses potes déclarent (dans les courtes interviews qui jalonnent ce DVD) que le Grateful Dead a largement influencé leur musique. Maintenant, une écoute attentive de la discographie du groupe convaincra les plus sceptiques. Non, Blackberry Smoke ne donne pas dans le « Southern rock » !

Troisièmement, Charlie Starr est un guitariste d’une finesse indéniable et d’une grande sensibilité. Il possède également une voix taillée sur mesure pour la country et les morceaux « laid back ». Ses solos concis vont directement à l’essentiel, appuyés par un style précis et fluide, et Charlie les balance d’un air tranquille et avec un calme impressionnant. Incontestablement, ce mec a du talent et de la classe !
Voici donc un bien beau DVD, témoignant d’une rencontre musicale très intéressante, qui ravira les amateurs de musique calme mais pas forcément les rockers sudistes. On a même droit à une prime ! On apprend comment Charlie, voulant assouplir un onglet de guitare avec la flamme d’un briquet, a failli mettre le feu au bus du groupe. Une sacrée anecdote, non?

Olivier Aubry